Si je n’avais pas l’obligation d’avoir un propre chez moi, un propre appartement, il est évident que je passerais ma vie dans cette caserne. Il y a tout ! Absolument tout, en plus des collègues ! Certes, il manque un peu de féminité, mais franchement, c’est le paradis à part ça. Payer à manger, à jouer, à faire du sport, à faire des défis à la noix, et j’en passe ! Evidemment, faut pouvoir se tenir prêt et entretenir le camion d’intervention. Rien ne doit passer avant un appel. On était en pleine partie de baby-foot quand l’alarme à sonner. Pas le temps de réfléchir et tels des robots on se dirigeait vers la sortie. Un accident de la route. Non loin d’ici. Si le trafic est fluide, on y sera en un rien de temps. Mais c’était trop espérer. Des embouteillages sont formés juste avant l’adresse de signalement. Aucun doute que ce remue-ménage est à cause de ce fameux accident. Je prends les choses en main et descend du camion. Les gars récupèrent le matériel nécessaire pendant que je pars devant, en éclaireur. Deux voitures sont en plein milieu de la route, bloquant les deux voies de circulation. La première chose à vérifier, les victimes. Je laisse mes collègues sécuriser le périmètre pour que je puisse m’aventurer, au risque d’une explosion. Seule une voiture comporte une personne. A croire que l’autre conducteur s’était tiré. Pathétique. Celui qui, inévitablement, était rentré dans cette autre voiture où se trouve une jeune femme. Une très belle femme plutôt ! Mais la porte de sa voiture est salement amochée. Je fais le tour et la porte du passager semble presque intacte. J’essaie d’ouvrir, mais rien. Les choses se compliquent un peu plus. Mais au moins, la blonde semble consciente. C’est le principal.

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J’ouvre difficilement un œil, j’ai mal à la tête et je ne sais plus où je suis... Ni même ce qui s’est passé... Je me souviens avoir pris ma voiture pour aller parler à quelqu’un en dehors de la ville. J’avais rendez-vous avec une source pour l’affaire Clarke et je ne me souviens pas de ce qui s’est passé par la suite... Avant de partir, je me souviens avoir eu une mauvaise nouvelle, une nouvelle qui m’a déstabilisée. J’ai été convoquée par Madison Harper, la flic de la ville et celle qui travaille sur l’enquête du meurtre du maire. Mais surtout, elle nous a arrêtées, Nora et moi, au tribunal pour le meurtre de James, le père de Nora. Et, d’un côté, elle a raison, nous sommes coupable mais ne l’était-il pas lui aussi, lui qui m’a coupé de tous mes liens extérieurs ? Mon seul contact c’était Enora et jamais, il n’aurait pu croire que nous tomberions amoureuses l’une de l’autre. Et pourtant, c’était bien arrivé... Et ça avait sauvé ma vie, sauvé de ses griffes mais en contre partie, nous devions partir sur les routes et fuir notre meurtre.

Voilà ce que je me souviens alors que j’ai la tête qui éclate, que j’ai mal dans le bas du dos et que j’ouvre les yeux. L’airbag de mon siège s’est déployé et je comprends petit à petit ce qui se passe, ou en tout cas, que je suis dans ma voiture. Qu’elle est à l’arrêt et que mon airbag s’est ouvert. Mais savoir ce qui s’est passé entre le moment où j’ai pris le volant et ce moment où je me retrouver dans ma voiture accidentée, je ne pourrais pas le dire... Alors que je me remets à peine de mes découvertes, j’entends des bruits près de moi, que la porte semble trembler... Difficilement, je tourne la tête et voit un jeune homme, un pompier, tenter d’ouvrir la porte côté passager. Difficilement encore, j’essaie d’ouvrir la bouche :

« C’est... C’est mo...moche de...dehors ? »

Je sens mon corps endolori et je réprime une grimace...

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La blonde accidentée semble complètement paumée. Rien de plus normal. J’observe la situation et avec cet airbag qui la compresse, je ne vois pas grand-chose. Je farfouille dans ma combinaison et en sors mon couteau suisse alors qu’elle essaie de me poser une question. Avec tout le grabuge et le boucan de l’extérieur, j’ai du mal à discerner sa phrase. Je fronce les sourcils et ne suis pas sûr que sa requête soit vraiment en rapport avec sa position Surtout ne bougez pas. Je vais vous sortir de là. Je m’avance sur le siège du passager libre, et dégaine la lame pour la planter délicatement dans l’air bag de trop, le faisant glisser vers le haut pour éviter tout autre accident. Je retire alors ce qu’il y a du parachute et remarque sa ceinture toujours en place. Je m’approche alors de l’attache en question, retiens la boucle d’une main et la décoince d’une autre. Cette dernière se défait sans problème. Une bonne chose. Vous pouvez bouger les bras ? lui demandais-je, comme pour lui faire comprendre que je vais la libérer de sa voiture, petit à petit. Mais le risque d’une explosion n’est toujours pas écarté et malgré mon calme, j’ai plutôt intérêt à me grouiller à la sortir de là. Une fois que j’eus le champ libre, je la dégage alors complètement de sa ceinture, passant au plus proche de son corps. En d’autres circonstances, j’en aurais sûrement perdu mes moyens, mais dans mon métier, c’est tellement fréquent que je ne fais même plus attention. La proximité n’est plus un problème dans ces moment-là. Il n’y a plus de bulle d’intimité existante. Et les jambes ? Vous pouvez les bouger ? Il n’est pas rare que dans les accidents de voitures, sous le choc ou le traumatisme, les victimes sont incapables de bouger. Il y évidemment des cas bien plus grave où il est même nécessaire d’appeler des carrossiers pour venir découper la voiture. Mais heureusement, ce n’est pas le cas de cet accident.

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Décidément, en ce moment, ça n’était pas la grande forme pour moi. Je me retrouvais sous l’effet d’une enquête par l’inspecteur Harper, mon passé refaisant surface et en plus, je me retrouvais dans un accident de voiture. Trop prise par mes problèmes, je n’avais pas le piéton qui traversait et si je n’avais pas fait une manœuvre pour l’éviter, je l’aurais pris de plein fouet. J’avais déjà la conscience bien assez encombrée comme ça pour ne pas rajouter un autre mort sur celle-ci. J’avais alors pris de plein fouet un arbre et je pense, un autre véhicule qui attendait pour tourner à gauche. En fait, je ne me souviens pas de grand-chose, les détails me reviennent doucement et je n’ai pas le temps d’y penser qu’un beau pompier vient à mon secours. J’essaie de lui parler, de lui demander si c’était moche dehors, si j’ai fait un sacré grabuge ou pas. Il ne me répond pas, il me demande de ne pas bouger et me rassure sur le fait qu’il va me sortir de là. Je le vois bouger autour de moi et je fais ce qu’il me dit, je ne bouge pas. J’essaie quand même de le remercier d’une faible voix.

« Merci ! »

Il s’agite autour de moi et après s’être occupé de l’airbag, il s’approche de moi et retire la ceinture qui est toujours accrochée. Heureusement que je l’avais celle-là, sinon, je ne donnais pas cher de ma peau. Quand il me demande si je peux bouger les bras, je tente de le faire et j’ai une petite grimace quand mon bras droit se lève. J’y arrive mais je le sens endolori, très meurtri.

« Oui mais…. Me fait mal ! »

Dis-je dans un nouveau souffle, j’ai toujours du mal à parler… Le choc certainement, je m’en rends difficilement évidemment. Après cela, il me retire complètement la ceinture et se rapproche de moi pour me sortir de là. J’ai plus que jamais envie de me retrouver autre part que dans cette épave mortelle. Ensuite, il passe à mes jambes et je tente de les bouger, au début, elles ne veulent pas bouger et j’ai un moment de panique, dans ma tête, j’ordonne à mes pieds de bouger et finalement, elles finissent par le faire…

« Oui ! »

Dis-je dans un souffle de soulagement, un petit sourire sur les lèvres.

« Oui, j’y arrive ! »

La paralysie est évitée, je suis soulagée comme jamais. Je ne suis peut-être pas encore remise de cet accident mais j’ai encore conscience que j’aurais pu perdre mes jambes.

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La première chose à faire, en toute circonstance, c’est d’éviter la panique. Si je commence à lui raconter le bordel qu’il y a dehors, on n’est pas sorti. Mon but principal est de sortir la blonde de son habitacle mortel le plus rapidement possible mais dans la plus grande sérénité. Je la libère alors du mieux que je peux, lui demander si elle peut bouger bras et jambes, et malgré une certaine douleur dans l’un de ses bras, elle n’a rien de cassé. C’est le principal. Mais le plus dur reste tout de même à faire. La sortir de sa voiture sans lui faire davantage de mal. Je lui souris délicatement mais toujours un peu inquiet Parfait. On va pouvoir sortir d’ici, vous êtes prête ? J’attends alors son consentement avant d’enchaîner les explications. Je vais vous aider à vous libérer les jambes. On va y aller, tranquillement, à reculons. Je passe alors mes bras sous les siens pour la soulever délicatement, la faire passer sur le pommeau du levier de vitesse. Elle semble avoir de grandes jambes et ça ne risque pas d’être une mince affaire. Mais je recule, doucement, et rajoute Dites-moi si je vous fait mal. J’entends alors la sirène du camion et me rassure sur le fait qu’elle aura très certainement un brancard pour s’installer quand on sera enfin sorti d’ici. Même si je profite tout de même du fait de pouvoir sauver une si belle demoiselle en détresse. C’est plutôt rare entre les mamies et les chats dans les arbres.

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Je suis soulagée de voir que mes pieds bougent tout comme mes bras. Soulagée de savoir que je ne suis pas paralysée parce qu’avec la vie que je menais, je n’avais pas besoin, en plus, d’être paralysée à vie. Vous imaginez une femme en fuite qui doit partir à toute hâte en chaise roulante ? Autant que je me dénonce directement et que j’aille en prison plutôt que d’empirer encore les choses pour Enora et moi. Il sourit à ma réaction et je me rends compte que le mythe du pompier n’est pas qu’un mythe. Mais, jusqu’à présent, je ne m’étais pas arrêtée à détail, j’avais d’autres choses en tête, comme penser que j’avais de la chance d’être encore en vie et d’avoir mes bras et mes jambes qui fonctionnaient toujours.

« Je crois ! »

Lui dis-je alors qu’il me demande si je suis prête à sortir de là. Je n’arrive pas à faire de plus longues phrases, je sens bien que j’ai encore du mal à respirer et donc, à faire de longues phrases. Il m’explique alors qu’il va me libérer les jambes et que nous allons tranquillement sortir en reculons, pour arriver du côté passager.

« D’accord ! Je… je vous suis ! »

J’avais envie de rajouter les yeux fermés mais c’était déjà trop long. Il passe ses mains sous mes bras et je me sens me soulever un peu. Il me fait passer au-dessus du levier de vitesse que je sens sous mes jambes quand elles passent dessus.

« Je… je sens le le… levier ! »

Dis-je contente de ressentir des choses dans mes jambes. Alors que je passe sur le siège passager, je sens une douleur lancinante et furtive dans les côtes, je crie.

« AAAAAAAAAAAAh ! »

Ca passe rapidement et je ne sais pas ce qui s’est passé, peut-être une blessure plus profonde autour du bas de mon dos. Peu importe, je sais que je suis en sécurité maintenant, j’entends la sirène qui s’approche. Certainement pour l’accident, je vais être entre de bonnes mains, je le suis déjà mais

« Mon dos ! Me fait… mal ! »

Dis-je pour préciser où j’ai mal avant même qu’il ne me pose la question. Nous sommes presque en dehors de la voiture, je sais que je dois encore mordre un peu sur ma chique. Quoique je pense que je vais encore avoir mal un petit temps mais je ne serai plus dans cette maudite voiture au moins.

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A tout moment, dans ce genre de situation, le sang-froid est de rigueur. De un, on ne sait jamais sur qui on va tomber. Sur une personne très douce, gentille, timide ou non, aguicheuse, nerveuse, angoissée, confiante, méfiante. Tant de cas de figure se sont déjà présentés à moi et pourtant je ne suis pas non plus dans le métier depuis très longtemps. Pas comme certains de mes collègues. Toujours est-il que j’ai appris à discipliner mes réactions. Succomber aux charmes d’une victime ne m’est jamais arrivé et pour cause, j’arrive toujours à bloquer ce genre d’attirance avant même qu’elle n’arrive. Autant dire qu’avec cette blonde, ça aurait pu être totalement le cas. Mais j’en fais abstraction et depuis le début, je me concentre sur sa survie et la rapidité à laquelle j’allais pouvoir la sortir d’ici. Elle essaie de parler, elle se montre très coopérative et ça me facilité considérablement le travail. Mais au moment de la faire passer par-dessus le levier de vitesse, elle me fait presque avoir des sueurs froides. Tout d’abord elle me donne presque envie de rire, et la seconde d’après, elle m’effraie de par son cri. Mais ce dernier, j’en ai davantage l’habitude et m’arrête net dans mon geste. Je la garde contre moi pour éviter qu’elle ne bouge et avant même que je ne puisse lui demander quoi que ce soit, elle m’informe tout de suite que son dos lui fait mal. Je ne vois déjà pas de sang couler, c’est une bonne nouvelle. Ou pas. Bien qu’il soit rare de faire une hémorragie interne au niveau du dos Mes collègues sont là. On essaie une dernière fois ? Rapidement. A trois. Vous êtes prête ? Je lui laisse alors le temps de me répondre, de me dire quand elle est prête et commence à compter Un, deux, trois, soufflez ! Et je l’extirpe complètement de la voiture dans un mouvement vif et délicat. Mes collègues arrivent déjà avec le brancard, elle n’a plus que quelques secondes à patienter. Je leur fais signe pour qu’ils se magnent un peu plus.

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J’ai l’impression que ce sauvetage dure une éternité mais comment en vouloir au pompier ? Il faisait aussi vite que possible, en plus, vu ma situation, je ne pense pas qu’on pourrait aller plus vite. Mais, je commence à être à l’étroit par ici, j’ai l’impression que je vais étouffer si je ne sors pas vite… Peut-être que je veux être juste rassurée sur l’état de mon corps après cet accident. Je suis déjà rassurée d’avoir senti mes jambes et mes pieds tout comme mon dos, mon dos qui me fait horriblement mal alors que je tente de passer au-dessus du levier de vitesse, difficilement. Une douleur atroce et fulgurante passe dans le bas de mon dos et je le lui dis immédiatement. Je fais une petite pause, attendant que la douleur passe et le pompier me rassure, il me dit que ses collègues sont là, il est prévenant et ça aide. Dans ce genre de situations, ça aide vachement… Il me demande si on peut réessayer une dernière fois, rapidement et qu’il va compter jusqu’à trois. J’acquiesce de la tête :

« D’acc…ord ! »

Je lâche aussi audiblement que possible. Puis, il commence à compter et me dit de souffler. Je l’écoute et je mords sur ma chique alors que la douleur revient. Je souffle à la place de crier, je veux m’extirper de là, je veux me sortir de là, c’est clair. Ca y est ! Je suis en dehors de la voiture, cette fichue voiture que j’ai cru être mon tombeau pendant un moment. Je vois des gens courir vers nous avec un brancard, certainement les collègues de mon sauveur. Je pleure un peu, la douleur est insoutenable, je regarde mon sauveur et enfin, le brancard est prêt à m’accueillir. On m’y place et on est prêt à m’emmener à l’hôpital mais j’attrape la blouse de mon pompier et lui dit :

« Vous pouvez venir avec moi ? »

Je me sens seule et pour quelques secondes, il fut la seule personne avec moi. Je voudrais qu’il téléphone à Enora pour qu’elle vienne mais en attendant, j’aimerais tant ne pas être seule pour partir à l’hôpital…

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Si ces quelques minutes sont passées plutôt rapidement pour ma part, j’imagine bien que ce fut complètement l’inverse pour la blonde. D’autant plus qu’à la dernière étape, une douleur dans son dos s’est déclenchée. De quoi rendre le sauvetage encore plus délicat et dangereux. Mais dans tous les cas, l’évacuation est primordiale. Je ne lui laisse pas vraiment le choix. Je l’informe avec la forme de la politesse. Je ne peux décemment pas la laisser allongée là, dans sa voiture, voiture qui risque d’exploser à tout moment. Je comptais bien d’ailleurs rester sur place pour vérifier qu’aucune embrasement ou explosion n’est à craindre, mais au moment où je savais la blonde sur son brancard, prête à filer jusqu’aux urgences, elle me retient et me demande de venir avec elle. J’aurais du m’en douter. Combien de personnes (particulièrement des femmes) m’ont demandé cette faveur ? Je ne les compte même plus. Je reste interloqué un moment, observant son visage si parfait et lui répond avec un sourire en coin mais sincère Je vous accompagne Madame. Après tout, je ne connais toujours pas son prénom, et je suis surtout là pour l’aider. Et si elle a besoin que je vienne, autant le faire. D’autres collègues s’occuperont de sa voiture pour éviter tout dégât supplémentaire. Je monte alors en amont à l’arrière de l’ambulance et me retrouve avec elle et un autre de mes collègues qui lui prodiguent les premiers soins que nous sommes aptes à donner. Pour ma part, je me dois de vérifier l’état de son cerveau Vous vous appelez comment d’ailleurs ?

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